Tout ça pour ça ! Il aura fallu Angelina Jolie et Johnny Depp pour resservir la soupe d'Anthony Zimmer, le film refait selon une vision américaine. Un remake d'autant plus risqué qu'il s'agit d'un film à énigmes, à suspense dont on connaît déjà la fin, le début et l'entre-deux.
Pitch
Pour se remettre d’une rupture amoureuse, Frank, simple professeur de mathématiques, décide de faire un peu de tourisme en Europe. Dans le train qui l’emmène de Paris à Venise, une superbe femme, Élise, l’aborde et le séduit. Ce qui commence comme un coup de foudre dans une ville de rêve va vite se transformer en course-poursuite aussi énigmatique que dangereuse…
A quoi bon recycler les failles du film français : une ambiance trop tranquille pour un tel genre cinématographique ; une confusion de personne dans le train qui manque d'être crédible au vu du dénouement final ; une femme qui ne reconnaît pas un homme qu'elle aime à sa seule voix. Le seul bon côté de ce remake est ce jeu de pistes so romantic, permis par ce jeu d'enveloppes à expéditeur-mystère, disséminées tout au long du film, et qui fait fantasmer Madame. Le remake n'a pas trouvé utile que de bonifier l'œuvre originale. Mais il la pare surtout d'un luxe vestimentaire et décoratif, d'une esthétique. L'esthétique au service de la forme cependant.
Quand Anthony Zimmer nourrit son fonds de scénario, au demeurant lourd, d'un cadre d'intrigue qui le rend plus pesant encore, The Tourist nous envoie de Paris à Venise, avec force de bling-bling. A tel point qu'on se demande si The Tourist n'est pas une carte postale de Venise et si les producteurs n'en ont pas trop fait dès le départ : Depp et Jolie au casting, la visite pour 8,40 euros de Venise depuis son meilleur hôtel jusqu'à son aéroport, quatre robes de grand couturier pour la seule Angelina Jolie, une montre en or (quelle marque ?) qui affiche l'heure dans l'interstice d'un gant, un cortège monstre de figurants sur des places publiques, wagon de train ou terrasses de restaurant ou bar, des balades en hors-bord pour Madame, un cocktail de chez « monsieur l'ambassadeur ». C'est simple il ne manquait que les masques de Loup pour pimenter encore plus cette recherche de l'homme mystère.
Ajoutez à cela des séquences d'action encore plus tranquilles que dans Anthony Zimmer, et l'évaporation de la névrose affichée par Yvan Attal, et vous obtenez moins un thriller qu'un film commercial. Toutes les séquences sont en deçà de celles de l'original. Il était en outre inutile de creuser davantage, selon 20 minutes supplémentaires environ, la présence et la dualité entre le rôle féminin principal et le rôle-titre masculin. Il est évident que cela est lié à une mise en valeur des acteurs. Mais cela se fait au détriment de leur personnage : qui devaient se nourrir de la pénombre et non de la lumière accrue des lustres de diamants. La disparition durable de Sophie Marceau apportait au personnage interprété par Attal un certain cocktail de névroses, communicatives. Le spectateur, ici dans The Tourist, est tout simplement réduit à un consommateur, tandis qu'il subissait toute une atmosphère, lourde et pesante dans Anthony Zimmer.
Dans l'ensemble, la direction des acteurs semble à la source de tout : on retrouve chez Johnny Depp et Angelina Jolie cette retenue qu'ils n'affichaient pour ainsi dire jamais. On voit très bien leur effacement au profit d'un ensemble. Florian Henckel van Donnersmarck avait d'ailleurs fait transpirer ce calcul, cette froideur chez ses interprètes déjà dans La Vie des Autres. Dans un thriller, il s'agit de ne surtout pas retenir ses acteurs, au contraire il faut leur en demander plus. Ce travail n'a pas été fait. Dès le départ une erreur de producteurs, donc.
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